Caroline Vergauwen (RG Tegel): “Le monde de la céramique forme un chouette terrain de jeu!”
Déployer ses ailes
C’est difficile à concevoir, mais c’est donc bel et bien par un concours de circonstances que Caroline Vergauwen poursuit aujourd’hui le travail de son père et de son grand-père. “Ce scénario n’était assurément pas écrit dans les astres”, acquiesce-t-elle. “Mes parents n’ont quoi qu’il en soit poussé aucun de leurs trois enfants dans cette voie. Et pourtant, j’ai rejoint l’entreprise en 1992, après mes études. Mais plutôt par envie d’explorer, de me tester. L’entreprise était alors beaucoup plus petite qu’aujourd’hui et je pense que mon père m’a, à un moment donné, indirectement motivée à déployer mes ailes, ce que j’ai fait. Après 9 ou 10 ans, j’ai ressenti le besoin de changer d’air. Je suis très têtue et voulais à cette période surtout faire mes preuves. Ne pas partir n’aurait pas été une bonne chose, car je ne me serais jamais épanouie au plan professionnel comme j’ai pu le faire.”
Second passage
En 2003, elle fondait avec son époux – un producteur de télévision bien connu en Flandre – la maison de production Sultan Sushi. Dix ans plus tard, alors que celle-ci employait une centaine de personnes, Sultan Sushi a été revendue à un groupe allemand côté en bourse. “Conséquence: en 2013, j’étais à nouveau disponible sur le marché de l’emploi. Mon père, qui avait alors déjà passé 65 ans, avait signalé qu’il voulait se retirer. Il m’a effectivement demandé si je n’avais pas envie de prendre le relais. Ce que je voulais bien faire, c’était me charger de la vente de l’entreprise. Et c’est ainsi que cela s’est passé.”
“Plus je négociais avec un candidat repreneur, plus j’avais le sentiment que l’entreprise allait perdre son âme et que le travail d’une vie de mon père et de mon grand-père allait être anéanti. Ce qui m’a décidée à mettre un terme aux négociations et à finalement reprendre l’entreprise de mon père. Je trouvais très important de racheter RG Tegel. Parce que cela m’oblige à rester très concentrée et à ne pas me relâcher. Evidemment, c’est aussi lié à une question de fierté.”
Une enfance agréable
En 2013, Caroline Vergauwen ainsi est revenue pour la seconde fois sur les lieux où elle avait passé tellement de temps durant son enfance. L’entreprise s’appelait alors encore Tegelfabriek Rosseau Gustaaf, du nom de son grand-père qui l’avait fondée en 1952, et était à cette époque renommée en tant que fabricant de carreaux de ciment. Quand j’étais jeune, lorsque je n’étais pas à l’école, je passais mon temps entre les murs de cette entreprise. Une très chouette période!”
“La transition de la production à l’importation n’a pas dû être facile: tout réorganiser, licencier une cinquantaine de personnes…Pourtant, mon père (Richard Vergauwen est désormais âgé de 73 ans, ndlr.) a réussi à faire de RG Tegel un acteur intéressant et une valeur sûre sur le marché belge. Je trouve le travail qu’il a effectué fantastique!”
“Ce que j’ai appris de lui? Qu’il faut toujours rester soi-même, les pieds sur terre, et ne jamais planer. Mon père est une personne très aimable, qui a pris soin de l’entreprise et des gens qui y travaillent. Je pense que je peux encore apprendre de lui chaque jour.”
Suffisamment voix au chapitre
“Peut-être que les chefs d’entreprise de ma génération sont un peu plus accessibles, qu’ils se mêlent un peu plus aux gens. Alors que la génération précédente était un peu plus distante, et s’isolait plus rapidement dans des bureaux fermés. Ma porte est toujours ouverte, je suis quelqu’un de très accessible et ouvert. Je crois aussi fortement qu’il est préférable, en tant que CEO, de s’entourer des personnes appropriées et qualifiées dans les matières que vous ne maîtrisez pas vous-même, et qu’il ne faut pas du tout en avoir honte. Il faut donner à l’équipe dont vous vous entourez suffisamment voix au chapitre, mais aussi suffisamment de liberté et de confiance. Veillez à ce que ces gens se sentent soutenus et bien entourés. Être à l’écoute des gens permet d’acquérir des connaissances et de la sagesse.”
“Par rapport à mon premier passage chez RG Tegel, l’entreprise a totalement changé. Avec les possibilités qui s’offraient à lui à ce moment-là et qui s’avéraient aussi nécessaires, mon père a fait grandir l’entreprise de façon constante. Mais il est vrai que la plus grande expansion est survenue au cours de la période entre 2013 et aujourd’hui. En quatre ans, le nombre de collaborateurs est passé de 37 à 50. Et nous constatons que notre chiffre d’affaires augmente encore chaque année, sans délibérément rechercher une telle croissance. Le fait que 19 camions pleins en moyenne soient déchargés ici chaque semaine et que nous ayons écoulé 600.000 m² de carrelages l’an dernier est tout de même significatif!”
Confortablement installé dans le peloton
Non seulement RG a subi une métamorphose spectaculaire, mais le secteur lui-même a aussi fortement changé ces dernières années. “Outre les nombreuses consolidations, j’ai le sentiment que le marché s’est professionnalisé”, selon Caroline Vergauwen. “Je remarque aussi une délimitation claire des différents acteurs. Une évolution qui a cours depuis quelques années. Je pense que les jeunes générations de directeurs en sont très conscientes. J’aime cependant la clarté. Avec plusieurs importateurs de carrelages qui sont exclusivement des grossistes, d’autres qui combinent ce rôle de grossiste avec le marché des particuliers ou des projets, certains qui sont spécialisés dans la rénovation de salles de bains ou qui se profilent comme l’Ikea du secteur du carrelage. Je trouve que chacun d’entre eux à sa manière preste joliment. Evidemment, il est clair qu’une concurrence saine joue un rôle dans chaque secteur; celle-ci nous tient en éveil et vigilants, et rend justement ce métier passionnant. Chaque entrepreneur aime avoir un peu d’adrénaline! Il n’est cependant pas dans ma nature de surveiller continuellement les collègues-concurrents. Peut-être est-ce lié à mon bagage financier et RH, et pas commercial.”
“Vous savez, RG Tegel mène sa propre barque, comme l’entreprise l’a toujours fait et, dans ce récit, le client occupe une place centrale. Je préfère quoi qu’il en soit faire partie du peloton, un peu à l’abri du vent, que devoir faire la course en tête. Et je dois dire que cette position est très confortable.”
Pas de vente aux particuliers
Actif uniquement en Flandre, le grossiste de Massenhoven approvisionne 140 magasins de carrelage. “Nous tentons d’être présents dans chaque salle d’exposition de façon complémentaire avec les collègues-concurrents et composons une offre différente pour chaque client individuel. Nous lui proposons donc vraiment du sur-mesure à 100%, spécifiquement en fonction de sa clientèle et des marchés sur lesquels il est actif.”
“Lorsque j’ai racheté l’entreprise à mes parents, RG Tegel était active au niveau régional sur le marché privé, ce qui était perturbant tant pour nous que pour nos clients. Au printemps 2016, j’ai dès lors décidé d’arrêter totalement cette activité. Nous avons également communiqué cette décision à tous nos clients et l’avons clairement signalée sur notre site Internet. Au niveau financier, il s’agissait d’une saignée, mais depuis lors, la situation est plus sereine. Aujourd’hui, nous remettons aux particuliers qui visitent notre salle d’exposition une liste de tous nos points de vente dans les environs. Nos clients savent que RG Tegel est une société qui accorde sa priorité à la transparence et à la communication ouverte, et que nous tenons toujours nos promesses et respectons nos accords.”
“Vu que nous avons définitivement cessé la vente aux particuliers, nos showrooms sont désormais intensivement utilisés par les clients de la région. Parce qu’ils peuvent y présenter à leurs clients l’intégralité de l’assortiment. Une constatation qui nous réjouit.”
Showrooms neufs ou rénovés
L’innovation joue un rôle central pour RG Tegel. La nécessité d’une salle d’exposition technique s’est traduite en juin 2015 par l’inauguration de RG Technica. “Nous y exposons des matériaux exceptionnels, des prouesses techniques ainsi que les différentes possibilités. Comme les plaques fines grands formats: on pourra bientôt y voir notre assortiment de carrelages XXL, soit plus de 60 plaques différentes en matériau céramique! En deux ans, nos ventes de ces grandes plaques ont énormément augmenté. Les systèmes de façade ventilée, la série DeckWay de Kronos, etc., y sont également présentés.”
L’an dernier, la salle d’exposition à l’arrière a été totalement réaménagée et, cette année, RG s’attaquera à la partie avant du bâtiment. “L’objectif consiste à créer trois salles d’exposition qui constitueront un instrument de travail pour nos responsables régionaux et nos clients. Chaque exécution pourra être implémentée et réalisée sur mesure pour le showroom de notre client.”
Stockage
En tant que grossiste, l’entreprise RG Tegel se soucie-t-elle du fait que les négociants en carrelage ont de plus en plus tendance à procéder à leurs achats en direct chez les fabricants? “Cela ne nous a en fait peu ou pas posé de problèmes avec les années. Obstinés comme nous le sommes, l’entreprise a toujours continué de suivre son propre cap. Nous sommes un grossiste qui s’adresse au segment supérieur, avec les meilleures marques de fabricants à qui nous sommes toujours restés fidèles.”
“Depuis peu, nous proposons également des carrelages économiques de qualité. Nous remarquons que cela nous permet de toucher des acteurs qui, avant, stockaient eux-mêmes leurs produits ou qui, par la force des choses, s’adressaient à des collègues parce qu’ils ne pouvaient alors pas se procurer ce genre de produits chez nous. C’est donc désormais possible, qui plus est à des conditions intéressantes parce qu’ils sont clients chez nous. Peur eux, il s’agit d’une situation win-win à différents niveaux: vu qu’ils ne doivent plus se charger eux-mêmes du stockage, ils peuvent utiliser leurs moyens de façon plus ciblée. Car, que vous retourniez cela dans un sens ou dans l’autre, le stock constitue un capital qui dort. Et ce stockage constitue quoi qu’il en soit notre core-business; cela reste la tâche principale d’un grossiste.”
Digitalisation
RG Tegel mise aussi depuis longtemps déjà sur un autre volet, à savoir la digitalisation. En 2011, l’entreprise a par exemple développé une plateforme en ligne permettant aux clients de consulter les tarifs de tous les produits de la gamme, rendant ainsi superflus les tarifaires papier. Ce que Caroline Vergauwen qualifie de “première étape importante dans le cadre d’une politique durable. Nos entrepôts ont également été digitalisés en 2014-2015 – une opération qui a coûté environ 180.000 euros – ce qui a permis une gestion plus efficiente des hommes et des moyens, mais aussi de réduire la charge de travail. En 2016, nous avons développé l’appli ‘showroom en ligne’ ainsi que le système de commande RG, que nous allons maintenant introduire chez tous nos clients. Celui-ci leur offrira la possibilité de gérer leur propre showroom et permettra de demander des devis et de passer commande de façon encore plus efficiente et plus rapide. En outre, ce système permettra de personnaliser et gérer les étiquettes de prix.”
Un terrain de jeu passionnant
Le fait que les carrelages soient devenus de véritables produits de mode inspire Caroline Vergauwen au plus haut point!
“Nous cherchons constamment l’association parfaite. La succession rapide des tendances, la recherche des produits appropriés et la constitution de réserves optimales avec une rotation rapide des stocks ainsi que l’harmonisation parfaite des hommes et des moyens, voilà ce que je trouve le plus intéressant. La décision finale quant à la composition de l’assortiment me revient. Peut-être est-ce parce que je suis une femme, mais notre gamme a drastiquement changé par rapport à il y a deux ans: elle est plus jeune, plus raffinée, moins monotone. En collaborant encore et toujours avec les mêmes fabricants, mais tout simplement en posant d’autres choix. Dans la plupart des ménages, la femme a le dernier mot pour tout ce qui concerne l’intérieur. Il faut donc très bien savoir qui est votre client final et de quel budget il dispose. Je suis vraiment très passionnée par l’aspect esthétique de ces matériaux céramiques. Bref, laissez-moi encore prendre du plaisir quelques années dans le monde de la céramique. Il s’agit pour moi d’un chouette terrain de jeu où je ne m’ennuie pas la moindre seconde!”
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