Granigo, transformateur de pierre naturelle : "Tout doit être parfait dès la première coupe"

Granigo est bien connu dans la province du Limbourg. L'entreprise, basée à Lummen, a été créée au milieu des années 1990. Sous l'impulsion du nouveau repreneur, Günther Hermans, qui a troqué un emploi dans le secteur bancaire contre une entreprise où il pouvait apporter sa marque personnelle, Granigo est devenue une entreprise alliant technologie moderne et authenticité naturelle. Avec succès.

L’atelier et les bureaux adjacents sont situés au bord du canal Albert, où ils contribuent à façonner l'image de l'entreprise. La vue est splendide. Les immenses baies vitrées laissent entrer un flot de lumière estivale dans le showroom et les bureaux. Le comptoir de la réception – un arc sculptural qui semble avoir été taillé d'une seule pièce – capte l'attention qu'il mérite en tant que pièce maîtresse. Et malgré la passion des professionnels actuels pour les carrousels Instagram surchargés d'images filtrées, le bâtiment de Granigo reste un élément majeur, déroulant le tapis rouge pour les architectes d'intérieur et les clients.

"Aujourd’hui, il est crucial d’offrir un cadre inspirant aux architectes et autres visiteurs, surtout si vous visez le segment supérieur du marché", affirme Virginie Vuegen, en charge des ventes et du marketing chez Granigo depuis 10 ans.

"Public essentiellement B2B"

Günther ne peut pas être présent lors de l'interview. C’est donc Virginie, son bras droit, qui nous reçoit, accompagnée par Jeroen Demyttenaere, chef de l’atelier. L’atelier de Jeroen est parfaitement ordonné et étonnamment propre, son entrepôt constitue un showroom en soi. Sur des étagères bien rangées, on trouve une impressionnante collection de dalles de pierre naturelle dont la dimension rappelle une place de marché.

La production est entièrement confiée aux bons soins et au jugement de Jeroen, qui est revenu à Granigo après une période d'absence et peut à nouveau reprendre les choses en main. Sa passion pour la pierre naturelle n'a cessé de croître depuis qu'il a quitté l’école à 18 ans pour son premier emploi. Chez Granigo, donc.

"Si vous planifiez correctement le processus et que vous en discutez bien à l'avance, vous évitez bien des déceptions."

Comme nous le disions, le bâtiment et l'emplacement constituent la première étape du parcours du client auprès l'entreprise. "Nous travaillons principalement avec un public B2B", explique Virginie, "mais nous mettons un point d’honneur à soigner les détails de A à Z, tant au niveau de l'offre que des mesures, de la production et de l'installation. Chez Granigo, nous ne travaillons qu'avec nos propres installateurs. Toute notre équipe est présente sur place. Cette approche nous permet d'avoir un contrôle total sur chaque étape du processus".

Malgré cela, les clients ont la possibilité de prendre eux-mêmes les mesures, mais alors ils n’ont plus droit à la pose par l’équipe de Granigo. Si cela arrive-t-il souvent ? "Dans un cas sur dix, c’est le client qui prend les mesures", répond Virginie, qui ajoute que la proportion de clients privés n'est que de 5 %.

Segments supérieurs du marché

Comme c'est souvent le cas pour les entreprises de transformation de pierre naturelle, les architectes d'intérieur constituent la clientèle principale. Bien sûr, Granigo ne néglige pas non plus les réseaux sociaux pour illustrer son savoir-faire et son large choix de pierres naturelles, mais la société mise aussi sur les événements physiques, par exemple en invitant les architectes à un petit-déjeuner dans le showroom.

De telles initiatives permettent également d'attirer l'attention sur les innovations technologiques. Virginie nous montre un interrupteur ingénieusement intégré au plan de travail en composite de la cuisine d’exposition. Notre main semble errer sans but sur le plan de travail, et pourtant la lumière s'allume et s'éteint. Une touche de magie dans un ensemble resplendissant. Il arrive aussi à Granigo d’emmener un client dans l'une des usines italiennes ou espagnoles qui lui fournissent sa pierre naturelle. Une autre expression du souci du détail cher à l’entreprise.

Avec une telle approche, vous touchez naturellement les segments supérieurs du marché, où les exigences en matière de motifs, de veinage ou d’effets nuageux et de finitions innovantes sont élevées. "Granigo traite chaque client sur un pied d’égalité, mais nous sommes principalement actifs dans le haut de gamme - environ 80 %", ajoute Virginie, "La recherche du motif souhaité est donc la priorité. Le choix est donc la phase la plus importante de tout le processus".

Granigo n'achète pas sa pierre naturelle dans les carrières, mais s'approvisionne principalement auprès d'importateurs belges. "Si nous ne trouvons pas notre bonheur chez eux, nous allons chercher ce qu’il nous faut nous-mêmes, en Italie. Pour nous, c'est aussi l’occasion de faire le plein d’inspiration, car l'offre y est illimitée", conclut Virginie.

Prendre le temps

"Dans cette branche du luxe, vous avez aussi souvent des projets globaux", ajoute Jeroen, "où l'on cherche des motifs et des dessins qui serviront dans la cuisine, mais aussi dans la salle de bains, le salon, etc. Cela apporte une dynamique différente dans la production, où la perfection prime sur l'urgence du volume. Ici, nous prenons le temps nécessaire, pour respecter les exigences de qualité." Cela ne ravit évidemment pas le client, qui doit souvent composer avec une succession de retards tout au long de son projet de construction, mais Granigo y pallie par une excellente planification.

“Si vous planifiez correctement le processus et que vous en discutez bien à l'avance, vous évitez bien des déceptions”, ajoute Virginie, “même s’il y a toujours des imprévus, comme une pierre qui casse et qu’il faut recommander. Nous donnons à nos clients un délai acceptable d'une à trois semaines.”

 

"Un jet d'eau est plus onéreux, plus fragile, mais offre une stabilité dimensionnelle bien meilleure."

Mais la période du coronavirus a émoussé la confiance des clients. "Les récentes augmentations de prix n’y sont certainement pas étrangères", poursuit Virginie. "Nous le constatons au niveau de la durée de nos devis, qui sont nettement plus longs. Les changements de matériaux sont plus fréquents qu'avant à cause de ces prix. Même si l’augmentation du choix toujours y est certainement pour quelque chose. L'offre est devenue exubérante, particulièrement dans le secteur de la céramique. À cet égard, nous avons un rôle de guide important à jouer. Car aujourd'hui, de nombreux architectes ne savent plus où donner de la tête. C'est pourquoi nous les aidons et participons activement à la recherche de la bonne nuance ou de la couleur parfaitement choisie. Il est essentiel de respecter le choix de l'architecte".

La pierre naturelle représente environ 40 % de l'activité de Granigo, la céramique également, les 20 % restants sont constitués par le composite. Un ensemble plutôt bien équilibré.

Nouvelles tendances

Rester en phase avec les tendances en matière de design et les préférences des clients est un défi crucial pour les négociants et les transformateurs de pierre naturelle. L'évolution de l'architecture et de la décoration d'intérieur s'accompagne d'une modification de la demande des clients, qui recherchent des types de pierre, des couleurs, des finitions et des motifs spécifiques. Granigo constate une progression marquée du quartzite, en raison de son élégance et de sa facilité d’entretien. Le travertin calcaire est également en plein essor. "Il est très demandé", ajoute Virginie. "Parce que c'est un très beau produit, avec un excellent rapport qualité-prix.”

Les transformateurs de pierre naturelle doivent observer et analyser constamment le marché pour identifier les styles émergents afin d’adapter leur offre de produits en conséquence. Cependant, Granigo aime aussi faire la différence dans l'atelier, avec sa propre approche centrée sur la maîtrise du jet d'eau.

"La plupart des transformateurs de pierre naturelle travaillent encore beaucoup par sciage", explique Jeroen, "mais chez Granigo, nous utilisons le jet d'eau – nous en avons deux – pour presque tout, afin d'obtenir la plus grande précision possible pour les onglets et les motifs en livre ouvert. Avec une débiteuse à pont, on se retrouve vite avec une tranche d'un centimètre, ce qui nuit au dessin d'un motif en livre ouvert. Un jet d'eau est évidemment plus onéreux, plus fragile mais offre une stabilité dimensionnelle bien meilleure. Nous n'utilisons pas non plus beaucoup la polisseuse de chants, préférant le travail à la main. Nous avons la chance de pouvoir compter sur deux carreleurs qui excellent dans leur métier. C'est d'ailleurs dans l'ordre des choses : il faut d'abord apprendre à travailler la pierre manuellement avant de pouvoir programmer une machine. Sinon, on ne peut pas comprendre ce qui se passe. Comparé au composite, c’est un travail plus lent et plus délicat, mais la satisfaction n’en est que plus grande," poursuit Jeroen.

Investir dans les bonnes machines et les accessoires spécifiques s’inscrit dans la philosophie d'entreprise de Granigo. Jeroen : "Dans l'atelier, nous travaillons avec un disque diamanté dont il n'existe que deux exemplaires en Belgique. Ça a son prix, mais cela le vaut largement." Et où se trouve l'autre ? "Chez mon ancien employeur, où j'étais également responsable de l'atelier", poursuit Jeroen en riant.

 

La première coupe

Juste avant notre visite, Granigo a achevé l'un de ses projets les plus ambitieux : une villa spacieuse à Curaçao, dont l'ensemble du mobilier, de la cuisine au meuble TV en passant par la salle de bains, a été réalisé en pietra bicci, une variété de travertin. "Un moment fort, tant pour l’équipe de vente que pour le dessinateur et la production", souligne Virginie. "Et une véritable course contre la montre, car le conteneur pour Curaçao ne pouvait pas attendre."

Ce sont des projets comme celui-ci qui contribuent à façonner l'avenir de Granigo. "J'espère que dans cinq ans, nous serons toujours aussi performants. Et grâce à notre qualité de finition élevée et à notre équipe solide, nous sommes prêts à mener à bien d'autres projets aussi ambitieux." Le secret de ce travail d'orfèvre ? "Il faut que tout soit parfait dès la première coupe", conclut Jeroen.